D'une part la lettre témoigne de la grande influence que les Idéologues, ayant tous d'importants postes (Cabanis et Destutt de Tracy sont Sénateurs à l'époque), ont en France dans les premières décennies du XIXe siècle, d'autre part du climat amical qui règne parmi les Idéologues. L'amitié la plus grande est sans doute celle qui unit Cabanis et Destutt de Tracy: "1808, l'année qui lui enleva Cabanis et une amitié ancienne et chère, fut fatale à cet homme de fer. A partir de là, ce philosophe en apparence si froid délaissa ses travaux et, renfermé dans sa douleur, ne vécut plus que par ses souvenirs." (Caroline d'Estutt d'Assay, 1994)

Pierre-Jean-Georges Cabanis (1757-1808) peut être considéré comme l'un des fondateurs de l'Idéologie et comme tête éminente de ce mouvement. Membre de l'Institut à partir de l'an IV et professeur de clinique à l'école de médecine en l'an V, il réclame une Idéologie interprétée comme système scientifique global: [...] il résulte clairement que la physiologie, l'analyse des idées et la morale, ne sont que les trois branches d'une seule et même science, qui peut s'appeler à juste titre, la science de l'homme. (Cabanis, Rapports du physique et du moral de l'homme, 1824, t. 2, p. 7) La conception scienti-fique de Cabanis est une rupture décisive avec une tradition métaphysique qui avait séparé l'étude de l'homme physique de celle de l'homme moral: pour Cabanis, on ne peut étudier ces deux parties de l'homme que sous un seul point de vue, le point de vue idéologique.

Ami de Mirabeau et de Condorcet sous la Révolution, Cabanis était non seulement entré le premier dans la maison de Madame Hélvétius à Auteuil, mais en tant que son héritier, il continue la tradition du cercle d'Auteuil après sa mort.